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Portrait

Charles Kagimu

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Premier cycliste pro Ougandais

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"Faire du vélo m'a fait

découvrir plein d'endroits

et rencontrer beaucoup de

personnes, ça m'a  changé

la vie de façon positive, ce qui me motive à rouler encore plus chaque jour."

Les débuts...

     Charles Kagimu est né le 15 septembre 1998 à Kampala, la capitale de l'Ouganda. L'Ouganda est un pays anglophone d'environ 40 millions d'habitants situé en Afrique de l'Est, 5% des habitants sont concentrés dans la plus grande ville et capitale, Kampala. C'est une très grande ville assez développée mais plus de 39 % de la population vit sous le seuil de pauvreté absolue et 43 % est sans emploi. Le cyclisme en tant que sport y est presque inexistant, le vélo se résume à un moyen de transport et parfois à un loisir. C'est comme ça que Charles a commencé très jeune : "Je ne m'en souviens pas vraiment mais il me semble que j'ai fait du vélo pour la première fois à l'âge de 5 ou 6 ans." C'est ensuite à partir de l'âge de 14 ans qu'il en a fait plus régulièrement : "En 2013, j'ai commencé à aller à l'école en vélo car mon école était loin de la maison (environ 6km) et il n'y avait pas de moyen plus rapide et sécurisé que d'y aller qu'à vélo. Plus tard dans l'année, j'ai commencé à m’intéresser à faire du vélo comme un sport après que mon vélo ait été réparé par un ami qui était aussi cycliste dans un club. Malheureusement je n'ai pas pu continuer mes études car ma mère était seule à payer les frais de l'école et elle ne pouvait plus payer car elle n'avait pas d'argent et plus de travail depuis 4 mois." Charles a alors utilisé son temps libre dans le vélo et a rapidement commencé à prendre part à quelques courses locales. "J'ai donc commencé le cyclisme comme sport en 2014 car ça m'intéressait et j'avais le temps depuis que j'avais arrêté les études. J'ai fait quelques courses juniors chez moi avec mon premier club en 2015." Parmi ces courses juniors certaines étaient organisées par son ami Leon Matovu, cycliste lui aussi, qui n'est jamais passé pro mais a représenté l'Ouganda sur plusieurs courses internationales"Dans notre pays il n'y avait aucune base pour les jeunes cyclistes, raconte Leon. Moi j'ai grandi en tant que jeune cycliste, c'était très difficile, je me suis battu et quand je suis devenu l'un des cyclistes les plus importants du pays j'ai décidé de commencer à organiser des courses juniors. J'ai commencé en 2012 et je me suis rendu compte que l'on avait de bons jeunes cyclistes dans notre pays et Charles faisait partie des 6 meilleurs." Leon est de 10 ans l’aîné de Charles, ils se connaissent depuis 2012. "Il est l'un de mes 2 meilleurs amis que j'ai depuis longtemps, nous dit Charles, c'est une de ces personnes à la maison qui m'a toujours encouragé et m'a beaucoup aidé jusqu'ici." Leon Matovu ne manque pas de compliments pour Charles : "Il est très professionnel, et pas seulement sur le vélo. Je le connais depuis 6 ans, il est tellement coopératif, à l'écoute, déterminé, c'est le genre de gamin qui peut sacrifier ce qu'il a pour les autres pour être meilleur. Il n'a jamais été égoïste. Il aime tellement le cyclisme, il est toujours sur YouTube pour regarder les dernières actualités du cyclisme ou des entraînements pour chercher comment s'améliorer encore. Il suit le cyclisme sur tous les réseaux sociaux, il ne rate jamais l'entraînement, il est toujours à l'heure. Il a toujours voulu devenir il bon grimpeur."

     Nous sommes donc début 2015 et Charles prend part à ses premières courses en Ouganda. "Mais je ne pouvais pas continuer avec le même club, continue-t-il, car je m'écroulais financièrement et l'ambiance était décevante et décourageante." Il n'imaginait pas encore pouvoir faire du cyclisme son métier et c'est grâce à l'Africa Rising Cycling Center qu'il a réalisé qu'il avait peut-être un talent qui pourrait lui permettre de vivre sa passion...

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A gauche et à droite, Charles en 2015.

Ci-dessous à droite, Charles début 2016.

Ci-dessous à gauche, Charles (gauche) avec Leon (droite) au Rwanda en septembre 2016, ils ne se sont pas revus depuis car Leon est parti vivre aux Etats-Unis.

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L'Africa Rising Cycling Center et les Kenyan Riders

     "J'ai ensuite rejoint un autre club qui m'a aidé à progresser encore, ce qui m'a donné l'opportunité de faire un stage de 2 semaines à l'Africa Rising Cycling Center (ARCC) au Rwanda. J'y ai appris plus sur le cyclisme et ça m'a permis de réaliser que ça pourrait vraiment être mon métier." Il était le tout premier Ougandais à passer par l'Africa Rising Cycling Center, un centre de formation basé au Rwanda qui depuis quelques années a étendu son projet à tout le continent avec pour but de faire grandir le cyclisme Africain. "Le responsable de son club, Robert, nous a demandé si Charles pourrait participer au stage que nous organisions pour les juniors en décembre 2015, raconte Kimberly Coats, co-fondatrice de l'ARCC, on lui a dit qu'il pouvait venir et c'est là qu'on l'a rencontré pour la première fois. Il s'en est très bien sorti pendant le stage. Charles est un coureur calme et motivé. C'est quelqu'un de super et il a toujours été reconnaissant pour les opportunités qu'on lui a donné. C'était un plaisir de travailler avec lui." C'est aussi durant ce stage que Charles a rencontré Salim Kipkemboi, le Kenyan de la même génération qui est certainement à ce jour l'un des cyclistes africains les plus prometteurs. Charles et Salim sont aujourd'hui devenus de bons amis et Salim a aidé Charles à intégrer l'équipe des Kenyan Riders début 2017. "Quand je suis allé au Rwanda en 2015 j'ai rencontré Salim Kipkemboi pour la première fois, j'avais entendu parler des Kenyan Riders mais je n'avais aucune chance de les rejoindre pour le moment. J'ai dit à Salim que j'aimerai intégrer leur équipe et il m'a dit qu'il essaierait de m'aider."

     Depuis plusieurs années l'équipe de développement Kenyan Riders-Safaricom permet de développer le cyclisme au Kenya, avec comme but de faire devenir le Kenya un grand pays de cyclisme. Car, si les kényans sont redoutables sur les marathons, ils n'ont encore vu aucun grand champion cycliste émerger au plus haut niveau (à l'exception de Chris Froome), ceci à cause d'une absence d'infrastructure jusqu'à ce que les Kenyan Riders fassent leur apparition. Les Kenyan Riders organisent des camps de recrutements pour repérer les jeunes talents partout au Kenya et, ils ont aussi permis à Charles Kagimu de les rejoindre suite à ses bonnes performances lors de plusieurs courses au Kenya : "Un an plus tard je suis allé au Kenya pour la première fois, afin de courir quelques courses et j'y ai rencontré d'autres personnes qui étaient dans le sport depuis un bon moment. J'ai été performant et je savais que je devais faire du cyclisme mon métier, ce qui n'était pas possible chez moi en Ouganda où tout le monde pensait que le vélo était un hobby mais ne pouvait pas être plus sérieux. J'ai fait de bonnes performances sur les courses que j'étais venu faire et le coach des Kenyan Riders qui avait déjà entendu parler de moi a été impressionné par mes résultats, j'ai donc eu l'opportunité de rejoindre l'équipe l'année suivante (en 2017)." Et Charles s'est montré très performant dès cette année 2017, le talent et la mentalité qu'il a montré ont permis au staff de lui faire confiance et il a été choisi pour passer un nouveau pallier et rejoindre l'équipe partenaire Bike Aid...

En haut à gauche, bâtiment de l'Africa Rising Cycling Center.

En haut en milieu, Charles avec son maillot des Kenyan Riders.

En haut à droite, Charles (à droite) avec 2 de ses coéquipiers Kényans.

En bas, l'équipe des Kenyan Riders 2017.

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Bike Aid

     L'équipe Allemande Bike Aid évolue en division Continental depuis 2014, son projet est d'aider à développer le cyclisme Africain en donnant la chance à de jeunes africains de venir courir en Europe. L'équipe compte à la fois de bons coureurs Allemands et de bons coureurs de plusieurs pays d'Afrique. Dan Craven, Mekseb Debesay ou Abdou Raouf Akanga sont notamment passés par Bike Aid. En 2017 l'équipe a signé un partenariat à long terme avec l'équipe des Kenyan Riders qui est donc devenue réserve de l'équipe Allemande. Les Kényans Suleiman Kangangi, Geffroy Langat et Salim Kipkemboi ont rejoint Bike Aid dès début 2017. Charles Kagimu a lui eut l'opportunité d'intégrer l'équipe en tant que stagiaire fin 2017. Timo Schäfer, 36 ans, est co-fondateur de l'équipe Continental, avec Matthias Schnapka ils ont un double rôle : ils sont à la fois coureurs et managers. Timo raconte la première fois qu'il a rencontré Charles : "C'était lors de ma visite à Iten (au Kenya) où avait lieux le stage des Kenyan Riders. Il venait juste d'arriver d'Ouganda et été intégré à l'équipe et au stage. Il s'est directement montré très ouvert et très intéressé puisqu'il connaissait Bike Aid pour en avoir déjà été 'fan'." En effet, lors de son stage à l'Africa Rising Center fin 2015, Charles avait assisté au Tour du Rwanda et avait soutenu Mekseb Debesay, qui courait alors pour la structure Allemande et avait remporté 2 belles victoires d'étapes. "Quand il est venu en Allemagne durant l'été 2017 il a su profiter de l'opportunité et s'est montré très intéressé de savoir comment progresser et devenir un meilleur coureur, continue Timo Schäfer. Nous l'avons fait signer en tant que stagiaire et il a directement très bien performé sur sa toute première course UCI en décembre, le Tour of Qanzhou Bay, où il a fini 10ème du classement général." Suite à ce stage, Charles à intégré l'équipe en 2018. Timo le décrit comme quelqu'un de "très dévoué qui est aussi très concentré sur ce qu'il fait. En tant que coureur il a aussi un super esprit d'équipe. Il est motivé pour apprendre beaucoup et progresser." 

     La saison 2018 ne s'est pas vraiment passée comme Charles l'espérait, il a notamment terminé 31ème du Tour of Antalya, 50ème du Tour de Savoie Mont Blanc, 51ème du Sibiu Cycling Tour, 54ème du Tour of Azarbaijan et a fini hors-délais la 2ème étape de la Route d'Occitanie. "Je suis très déçu de ma saison 2018. J'ai été malade aux les moments importants et je n'ai pas pu donner le meilleur de moi-même, j'espère que ma prochaine saison se passera bien mieux." Cependant Timo relativise : "Je ne pense pas qu'on puisse vraiment parler d'une saison décevante. Bien sûr les gars doivent comprendre qu'il y a de certaines attentes et qu'ils doivent aussi performer sur les courses européennes d'un certain niveau ; mais d'un autre côté c'était la première vraie saison de Charles et il a fait des courses comme la Route d'Occitanie où ce n'est pas facile d'obtenir les résultats qu'ils attendent d'eux-mêmes. Ils doivent être patients mais en même temps toujours faire plus d'efforts pour progresser en tant que coureurs (et ce n'est pas seulement de l'entraînement physique)."

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Et maintenant...

     Après sa petite déception en 2018, Charles espère rebondir en 2019. Son programme de courses n'est pas encore défini mais il devrait ressembler à celui de 2018. "Pour le moment je ne peux pas encore définir de programme précis pour lui. Déjà nous devons connaître celui de l'équipe (en tant qu'équipe Continental nous n'avons pas le privilège de déjà connaître les épreuves où nous serons invités), mais il est sûr qu'il sera de retour sur la Route d'Occitanie où nous avons déjà eu l'invitation pour la saison prochaine" précise Timo Schäfer. 

     Pour le moment, les meilleurs souvenirs de Charles dans le vélo sont "quand j'ai atteint des objectifs, parmi eux il y a quand j'ai eu pour la première fois la chance de courir en Europe l'année dernière grâce aux Kenyan Riders ou quand j’ai signé mon tout premier contrat avec Bike Aid." Il rêve maintenant de découvrir le plus haut niveau : "Mes rêves sont les mêmes que presque tous les cyclistes du monde, j'aimerai courir au plus haut niveau, faire les plus grandes courses du monde et gagner beaucoup." En tout cas, le cyclisme lui aura permis de sortir d'une situation difficile et l'a rendu très heureux, "Faire du vélo m'a fait découvrir plein d'endroits, rencontrer beaucoup de personnes, je me suis fait beaucoup d'amis et ça m'a fait changer la vie de façon positive, ce qui me motive à rouler plus encore chaque jour."

     Pour le cyclisme Ougandais, la situation est actuellement très difficile, "Le cyclisme en Ouganda est dans une très mauvaise situation à cause des dirigeants du sport qui manquent de moyens et sont corrompus, explique Charles, c'est encore pire depuis que le gouvernement ne peut plus aider. Nous ne sommes pas du tout aidés en tant que cyclistes et c’est très difficile de faire du vélo pour le moment. Mais j’espère que ça va bientôt changer." Leon Matovu a essayé d'aider à son échelle en organisant des courses amateures mais il ne s'est pas du tout senti soutenu : "Pour être honnête il y a des talents en Ouganda mais la fédération ne fais pas suffisamment d'efforts pour aider les cyclistes." Le problème est-il l’absence d'argent ou la corruption ? "Les deux" répond Leon sans hésiter. "La situation ne pourrait s'améliorer que si on arrive à se débarrasser de tous les membres de la fédération nationale. Ce sont les mêmes depuis des années et ils ne veulent pas partir." Malheureusement la situation semble ne pas être partie pour changer pour le moment, mais peut-être que si Charles atteint le plus haut niveau et y performe, il pourrait donner un nouvel élan et faire enfin considérer le cyclisme comme en vrai sport en Ouganda ? On l’espère et c'est tout ce qu'on lui souhaite !

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Charles Kagimu s'impose sur le Tour du Burundi 2017.

Merci beaucoup à Charles Kagimu ainsi qu'à Leon Matovu, Timo Schäfer et Kimberly Coats pour le temps accordé. Nous souhaitons beaucoup de réussite à Charles et Leon ainsi qu'à l'Africa Rising Cycling Center et à Bike Aid.

Pour savoir ce qu'il s'est passé pour Charles Kagimu de novembre 2018 à juin 2021, c'est dans cet article

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