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Champion national d'Angola

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Bruno Araújo

Portrait

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Bruno Araújo, 22 ans, est l'un des plus grands espoirs du cyclisme en Angola, pays lusophone d'Afrique du Sud-Ouest de 32 millions d'habitants. Issu d'une famille cycliste, il court dans l'équipe Continentale Angolaise BAI - Sicasal - Petro de Luanda. Nous vous le présentons à travers son témoignage ainsi que celui de son oncle et entraîneur Carlos César De Araújo.

En fin d'article, nous retraçons l'histoire du cyclisme en Angola grâce aux précisons apportées par Carlos.

Une famille cycliste

     Avant d'écrire cet article, nous ignorions que la famille Araújo et l'Angola avaient une longue histoire avec le cyclisme. On l'a rapidement compris dans les premiers propos de Bruno : "Je m'appelle Bruno César do Amaral de Araújo, je suis né le 7 janvier 1998, j'ai 22 ans et je viens de la province de Luanda (capitale de l'Angola). Depuis petit j'ai toujours été en contact avec le cyclisme car mon père Justiniano Araújo, mon oncle Carlos Araújo ainsi que mon frère Leonel Araújo ont toujours pratiqué le cyclisme. Mon père détient le record de titres de champion national avec 11 victoires au championnat d'Angola de cyclisme sur route, mon oncle a couru dans l'une des meilleurs équipe Portugaises - Sicasal-Acral -, et mon frère a été champion national dans la catégorie junior." Depuis 3 générations la famille Araújo tient une place importante dans le cyclisme Angolais, nous y reviendrons en fin d'article, c'est donc logiquement que Bruno a commencé à pratiquer ce sport très jeune. "Disons que j'étais destiné à faire du cyclisme aussi, mais ça n'a jamais été une obligation, j'ai tout de suite commencé à aimer ça."  Son père lui a appris à faire du vélo à l'âge de 7 ans sur le parking d'une station d'essence et depuis il a toujours aimé ce sport. "Ce que j'aime le plus dans le cyclisme c'est que c'est un sport qui unit tous les types de gens, un sport qui unit les fans avec les cyclistes : vous n'avez pas à payer de ticket pour aller voir une course de vélo. C'est aussi un sport qui promeut le tourisme d'un pays, un sport qui montre la rivalité de deux cyclistes pendant la compétition puis une fois la ligne d'arrivée franchie l’amitié créée entre les 2 cyclistes... J'adore le cyclisme." Au début il regardait le Tour de France avec peu d'intérêt et appréciait principalement Mark Cavendish et Alberto Contador, mais il a ensuite commencé à s'y intéresser beaucoup plus et son cycliste préféré est devenu Peter Sagan lorsqu'il courait chez Cannondale. "C'est encore aujourd'hui le cycliste que j'admire le plus, pour son intelligence de course et son talent, je suis tellement fan de lui qu'ici en Angola on me surnomme parfois 'Sagan'." Bruno a donc commencé à rêver de devenir lui aussi un grand cycliste un jour : "comme j'ai entendu parler du cyclisme professionnel très jeune, mon rêve a toujours été de faire partie d'une équipe World Tour."

Des courses au Portugal dès 16 ans

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Bruno Araújo en 2014, à l'âge de 16 ans, courant au Portgual dans l'équipe cadet de Banco Bic Tavira.

     Les cyclistes Angolais ont toujours eu pour habitude de partir courir au Portugal, Bruno Araújo y est allé très jeune : à l'âge de 16 ans il a pour la première fois intégré une équipe portugaise. "Avec 4 compatriotes (Dário Antonio, Igor Silva, Cruz Tuto et Mário Carvalho) nous avons rejoint l'équipe Banco Bic Tavira, j'étais dans l'équipe des cadets et eux dans l'équipe pro (l'équipe Continentale ensuite devenue Sporting Clube de Portugal/Tavira). Dário António et Igor Silva ont participé à la Volta a Portugal pour les pro, et moi la Volta a Portugal pour les cadets, c'était une toute nouvelle expérience et j'ai terminé 11ème au classement général." L'année suivante, en 2015, il participe à nouveau à quelques courses au Portugal et s'illustre également chez lui en Angola. "C'est en 2015 que j'ai commencé à avoir de bons résultats, j'ai terminé 6ème au classement général de la première édition de la Volta Angola, j'étais 1er junior."  En 2016, à l'âge de 18 ans, j'étais dans l'équipe junior Sicasal Bombarral et j'ai fait beaucoup de courses du calendrier portugais. Je suis très reconnaissant des opportunités qui m'ont été données."

     En 2017 et 2018, Bruno participe à de nombreuses courses en Afrique et au Portugal, il prend part aux tours de Côte d'Ivoire, du Maroc, du Rwanda, et 2 fois au GP Torres Vedras au Portugal. Il s'impose à plusieurs reprises sur les routes du Tour de Madagascar 2017 et remporte aussi plusieurs courses Angolaises. Il devient champion national pour la première fois en 2017 et remporte le maillot des sprints intermédiaires sur le Tour du Rwanda 2018. "A 19 ans, j'ai rejoint l'équipe Sicasal-Constantinos pour laquelle je cours au Portugal, mais j'ai dû ensuite retourner en Angola pour rentrer à l'université. 2018 a été une excellente année, avec comme meilleur résultat le maillot des sprints intermédiaires du Tour du Rwanda, mais malheureusement je n'ai pas pu défendre mon titre de champion national : j'étais dans le groupe de tête mais j'ai crevé et je n'ai pas pu rentrer."

Première année au niveau Continental

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     L'an dernier, l'équipe Angolaise BAI-Sicasal-Petro de Luanda, pour laquelle Bruno Araújo courait déjà, a obtenu le statut d'équipe UCI Continentale, nous détaillerons comment dans la dernière partie de cet article. Bruno a donc pu participer à toutes les plus grandes courses pros portugaises et africaines. Il a obtenu quelques bons résultats, à l'âge de 21 ans seulement : 10ème de la 6ème étape sur le Tour du Rwanda, 11ème de la course en ligne des jeux africains, un nouveau titre de champion national, et surtout une 2ème place au général du Tour du Burkina Faso derrière son équipier Dario Antonio. "2019 a été ma meilleure saison, j'ai commencé l'année avec un beau programme de compétitions internationales, puis j'ai été champion d'Angola pour la 2ème fois et j'ai fini par la 2ème place au général du Tour du Faso. Le résultat dont je suis le plus fier est le titre de champion national car ça a toujours été mon rêve de courir avec le maillot de champion de mon pays." En 2020, Bruno devait avoir un calendrier similaire, il avait déjà pris part à la Tropicale Amissa Bongo (où il avait pris la 8ème place sur la 5ème étape) et au Tour du Rwanda. Mais, comme tous les sportifs, il est aujourd'hui dans l'inconnu en raison de la crise du coronavirus. Il regrette cette situation mais continue sa préparation en espérant pouvoir courir à nouveau dans les mois à venir. En ce qui concerne le championnat national, "honnêtement je ne sais pas mais la fédération fait tous les efforts pour pouvoir l'organiser." "J'aimerais remercier Tchaco et Linkconnection pour le soutien qu'ils m'ont apporté en m'offrant un home trainer pour me permettre de continuer ma préparation."

     Bruno est un coureur très complet avec un bonne pointe de vitesse. "J'aime tous les types de courses car je pense que je peux plutôt bien me défendre dans tous les domaines. Je pense que mon point fort est le sprint, je sais que je manque encore d'expérience et de beaucoup d'évolution pour disputer les étapes des grandes courses mais j'aime les étapes assez plates avec quelques montées et une arrivée au sprint." C'est en effet sur des sprints en petit comité qu'il a obtenu ses meilleurs résultats, il avait par exemple terminé 10ème de la 6ème étape du Tour du Rwanda en réglant au sprint le peloton maillot jaune d'une 30ène de coureurs derrière les 9 échappées qui étaient partis dans les difficiles cols du début d'étape. L'étape avait été remportée par Przemyslaw Kasperkiewicz qui avait surpris ses compagnons d'échappée dans le final. "Mon point faible est le contre la montre individuel, mais j'ai travaillé dur pour l'améliorer et j'ai progressé grâce à l'aide de mon entraineur et de mon équipe." Carlos Araújo, l'oncle de Bruno qui est aussi son entraineur, le décrit comme quelqu'un "qui a tout pour atteindre le plus haut niveau du cyclisme mondial, tout est une question d'opportunités. C'est surtout un cycliste très travailleur, toujours prêt à suivre les directives données par son directeur sportif ou ses équipiers les plus expérimentés. Son humilité fera de lui l'un des meilleurs cyclistes Africains. Il a un très bon potentiel ; il est très fort au sprint, se défend très bien pour rouler sur le plat, sait bien se placer dans un gros peloton, n'abandonne jamais, est persévérant, et il progresse en haute montagne ; 2020 pourrait être l'année de son explosion."

     "Les meilleurs souvenir que j'ai dans le cyclisme sont la super amitié que j'ai avec mes équipiers, surtout Dário António. M'entrainer avec eux tous les jours, discuter, débattre... pour moi ils font partie de ma famille." Nous avons aussi demandé à Bruno quels sont ses objectifs à long terme et quels pourraient être ses rêves dans le cyclisme : "Mon plus grand rêve est de pouvoir intégrer le World Tour pour aider à développer plus le cyclisme dans mon pays et permettre que plus d'Angolais puissent être cyclistes pro. Un de mes plus grands objectifs, car je suis étudient en 3ème année à l'Université de l'Education Physique et du Sport, est de terminer ces études pour pouvoir aider le plus de cyclistes Angolais possible à devenir professionnels." "Je tiens à remercier d'abord Dieu pour me protéger tous les jours, toute ma famille qui me supporte beaucoup, le staff de l'équipe Banco Bai Sicasal Petro de Luanda qui fait tout pour aider les coureurs, Tchaco et Linkcnnect qui me supportent malgré les difficultés, ainsi que mon Université ISEFD qui m'aide beaucoup pour mes entrainements. Et sans oublier vous, PelotonMag, qui m'avez donné cette opportunité de m'interviewer et d'en apprendre plus sur le cyclisme Angolais." Nous tenons également à remercier Bruno ainsi que Carlos Araújo qui ont très rapidement et gentiement accepté de répondre à nos questions et qui ont apporté des réponses particulièrement détaillées et intéressantes. Carlos Araújo nous a aussi raconté toute l'histoire du cyclisme Angola, nous allons donc vous la présenter dans la partie suivante.

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Bruno Araújo et Dario Antonio, coéquipiers et amis. A gauche, 1er et 2ème du Tour du Faso.

L'histoire du cyclisme Angolais

If you don't understand French but speak Portuguese, and want to understand this part about the history of Angolan cycling, we can provide you Carlos Araujo’s text in Portuguese: contact us by private message Twitter or by using the tab "Contact".

     Carlos César De Araújo, l'oncle de Bruno qui est aussi son entraîneur et qui a créé l'équipe Continentale BAI-Sicasal-Petro de Luanda, nous a raconté l'histoire du cyclisme Angolais. Carlos est né en 1967 et vit à Luanda depuis 1975, "j'ai étudié la comptabilité, la gestion ainsi que l'anatomie humaine. J'ai aussi suivi des formations en massage, pédagogie, psychologie et informatique. Je suis un amoureux de culture générale. J'ai rejoint l'armée angolaise très jeune, en 1983. Je suis passionné de cyclisme depuis l'âge de 12 ans, j'ai été vice-champion d'Angola du contre la montre individuel en 1982, à 15 ans, en courant avec les élites. Dès mon plus jeune âge j'ai réalisé mon potentiel dans ce sport. A 18 ans j'étais déjà leader de l'équipe nationale Angolaise sur des compétitions internationales." En 1985 il remporte plusieurs courses en République Démocratique du Congo et en République du Congo Brazzaville. De 1989 à 1992 il court au Portugal dans l'équipe Sicasal / Arcal et participe notamment à la Vuelta a Espana en 1991. Il reste aujourd'hui le cycliste Angolais avec le plus grand palmarès. "1991 a été mon année d'explosion au Portugal, mais un accident sur la Volta ao Algarve m'a interrompu. Je suis retourné en Angola pour commencer une nouvelle étape de ma vie et, avec la mort de ma mère, j'ai changé mes projets de vie en Europe et j'ai décidé de me consacrer au développement du sport dans notre pays. Avec l'aide de ma famille, j'ai créé des équipes cyclistes et formé de grands athlètes. J'ai passé ma première formation d'entraîneur en 1993 et depuis je suis devenu le plus grand entraîneur de vélo en Angola." Il a continué à courir en Afrique jusqu'au début des années 2000, tout en dirigeant les plus grandes équipes Angolaise. Aujourd'hui il dirige l'équipe Continentale BAI Sicasal Petro de Luanda. La famille Araújo est une grande famille Angolaise qui a toujours été très impliqué dans le sport du pays, "c'est une famille totalement tournée vers le sport, avant l'indépendance c'était essentiellement des footballeurs, mais ils pratiquaient d'autres sports comme l'athlétisme, le hockey, le handball, la natation et le cyclisme." Depuis l'indépendance de l'Angola en 1975, la famille Araújo joue un rôle très important dans le cyclisme du pays. Voici donc l'histoire du cyclisme Angolais :

     "Le cyclisme Angolais a fait ses premiers pas bien avant l'indépendance de l'Angola, je ne suis pas sûr mais je pense que c'était à la fin des années 1930 ou au début des années 1940, à l'époque seuls les colonisateurs Portugais pratiquaient ce sport. A la fin des années 60 et au début des années 70, le cyclisme en Angola a connu un grand développement. Pendant 4 ans, jusqu'en 1973 ou 1974, a été organisé le 'Grande Prémio Nocal', course considéré comme le Tour d'Angola cycliste et les meilleurs équipes Angolaises recrutaient même de grands cyclistes Portugais comme Joaquim Andreade, Fernando Mendes, Venceslau Fernandes et d'autres... A cette époque il y avait déjà de bons cyclistes Angolais, à tel point que dans les années 60 l'équipe Ferroviaro De Luanda a participé à la Volta Portugal."

     "Après l'indépendance de l'Angola en 1975, le pays a eu une restructuration telle qu'il a fallu attendre 1978 pour que la vie des gens reprenne son cours normal. Le cyclisme a lui aussi été victime de cette restructuration, il est réapparu en 1979 grâce aux anciens entraîneurs et sportifs d'avant l'indépendance dont José Teigas et Leonel Araújo (mon défunt père). En 1981 l'Angola organise les 2ème Jeux d'Afrique centrale, la famille Araújo compte 3 cyclistes parmi les 6 de l'équipe nationale Angolaise. Sans aucune expérience, l'Angola termine 4ème équipe de ces Jeux où 10 pays étaient représentés. Suite à ce résultat, nous avons commencé à créer des équipes, les structurer et travailler dur pour former de nouveaux coureurs. Les 4 provinces qui avaient montré le plus de potentiel à l'époque coloniale ont été choisies pour avoir des équipes (7 équipes pour Luanda, 5 pour Benguela et 1 pour Huila et Huambo). En 1982, les premiers championnats nationaux de cyclisme sur route ont eu lieu conformément aux normes de l'UCI. La province de Luanda a dominé le cyclisme Angolais des premières années jusqu'à nos jours, leurs cyclistes et leurs équipes ont remporté plus de 90% des championnats nationaux organisés sur un total de 31 éditions. Après 1982, le cyclisme Angolais a réalisé de grandes choses, il y a eu grande évolution. L'Angola est devenu le meilleur pays d'Afrique centrale en dominant les grandes courses en République Démocratique du Congo, République du Congo Brazzaville, Cameroun, Côte d'Ivoire..." La famille Araújo a alors progressivement abandonné le football pour le cyclisme, elle a créé plusieurs des plus grandes équipes du pays et formé de nombreux coureurs et managers. "Avec cette évolution, nous avons commencé à travailler sur l'envoie de cycliste en Europe et en 1989 nous avons réussi à envoyer 2 premiers cyclistes au Portugal. J'ai été l'un des premiers cyclistes Africains à faire partie d'une grande équipe cycliste professionnelle à Sicasal / Acral de janvier 1989 à décembre 1992 et Justiniano Mendes de Araújo a représenté l'équipe amateur portugaise Sporting Pinheiro De Loures de janvier 1990 à décembre 1991. Aux Jeux Africains du Caire (Egypte) en 1991 l'équipe Angolaise prend la 5ème place sur le contre la montre par équipe et je termine 5ème de la course sur route. Le cyclisme Angolais a commencé à être vu comme très prometteur et parmi les futurs dominateurs du cyclisme Africain. La famille Araújo a renforcé le calendrier national des compétitions et, en 1992, a envoyé le coureur Amadeu Paivi dans une école de cyclisme française." L'évolution se poursuit après le retour de Carlos en Angola en 1993, la famille Araújo continue à prendre plus de place dans toute l'organisation du cyclisme Angolais. En 1998 est créée l'équipe Cimex / Benfica de Luanda, dirigée par Carlos César De Araújo, qui participe à des courses Portugaises et domine les tours du Sénégal et du Cameroun de 2000 à 2005.

     "En raison des problèmes économiques et politiques dans le pays, le cyclisme a connu un gros coup d'arrêt de 2006 à 2011, il y a eu une grande réduction du nombre d'équipes et d'athlètes, réduisant ainsi le niveau du cyclisme Angolais. L'une des principales causes de ce coup d'arrêt a été la décision de la nouvelle direction de la Fédération Angolaise de Cyclisme (FACI) qui a pris ses fonctions en 2006 et a provoqué la mise à l'écart de la famille Araújo du cyclisme Angolais. Notre famille a dû abandonner le vélo presque complètement en raison de cette décision qui était un sabotage et même une pression politique. De 2006 à 2008 j'étais directeur sportif adjoint de l'équipe professionnelle Portugaise Madeinox / AS De Candelas. En 2010, le ministère de la Jeunesse et des Sports Angolais a réalisé l'erreur des nouveaux membres de la FACI et a rappelé les membres de la famille Araújo pour leur demander de revenir, ils se sont entendus et la famille Araújo a repris des responsabilités pour faire repartir le cyclisme Angolais qui était en train de s'effondrer. Personnellement, j'ai repris la compétition jusqu'en 2013. Justiniano Araújo a exercé la fonction de Directeur Technique de la FACI, il était chargé de la création d'équipes et l'organisation de courses, plus tard il a été nommé vice-président de la FACI et moi directeur sportif de la FACI.

     En août 2010, la famille Araújo a organisé la première 'Tournée por l'Angola' en soutien à la lutte contre le cancer, un parcours passant par 11 provinces durant 3 semaines, comme une 1ère édition de la Volta Angola mais pas compétitive, plus comme un grand entraînement. La famille Araújo a continué à organiser cette Tounée jusqu'en 2017, c'est devenu 10 jours d'entrainement compétitif à travers les 5 provinces du nord du pays, sous le nom de Volta As Terras Do Café avec toujours cet objectif social d'aider la lutte contre le cancer. En 2011, une banque Angolaise (BIC) devient le principal sponsor de la Volta Portugal et demande à la famille Araújo d'améliorer le cyclisme Angolais pour que l'Angola puisse être présent sur les grandes courses portugaises à partir de 2013. Le travail de mobilisation des entreprises et des clubs a été difficile, il a fait passer le nombre d'équipes dans le pays à 18, toutes bien structurées et compétitives. Ca a aussi entraîné l’apparition de magasins de vente de vélo et d’équipement, et même la création de marques de vélo angolaises. En 2013, l'Angola a participé, avec l'équipe Benfica De Luanda, que je dirigeais, aux grandes compétitions Portugaises, à savoir la Volta ao Algarve et la Volta Portugal professionnelle, espoir, junior et cadet. Cette année là, Benfica De Luanda a signé un accord avec le Clube De Ciclismo De Tavira De Portugal pour qu'ils accueillent comme stagiaires 4 cyclistes, 2 élites (Igor Silva et Walter Silva), un espoir (Dario António) et un cadet (Bruno Araújo), et je les ai aussi rejoints en tant que directeur sportif adjoint. Bruno Araújo a pris la 13ème place du classement général de la Volta a Portugal chez les cadets. En 2014, Benfica De Luanda a à nouveau signé un accord avec le Tavira Portugal Cycling Club, cette fois ci pour 6 stagiaires : 2 élites (Igor Silva et Cruz Tuto), 2 espoirs (Dario António et Mário de Carvalho), 1 junior (Gabriel Cole) et 1 cadet (Bruno Araújo), et encore moi en tant que directeur sportif adjoint."

     "En 2015, l'équipe Benfica De Luanda domine la 3ème édition du Tour de la République Démocratique du Congo (Igor Silva et Dario António occupent les 2 premières places du général, Bruno Araújo termine meilleur jeune et victoire au classement par équipe). Grâce à l'expérience acquise par l'organisation des 'Tournée por Angola', la famille Araújo lance la première édition de la Volta Internacional Angola en octobre 2015. C'est le 3ème plus grand événement jamais organisé dans le pays depuis son indépendance derrière les Jeux d'Afrique Centrale en 1981 et la CAN Football en 2010. La course a duré 11 jours et traversé 9 provinces, elle est dominée par Benfica De Luanda qui réalise le triplé au général avec Igor Silva, Dario António et Cruz Tuto et remporte le classement du meilleur jeune avec Bruno Araújo. Après cet événement, certaines personnes ont à nouveau exercé de mauvaises pressions sur notre famille, ce qui a eu pour conséquence le retrait volontaires de certains membres de la famille, principalement les plus âgés, mais ils ont toujours continué à apporter leur soutien et transmettre leur expérience."

     "En 2016, l'Angola participe pour la première fois au Championnat d'Afrique de Cyclisme qui est organisé au Maroc. Chez les juniors, l'équipe prend la 3ème place du contre la montre par équipe et Bruno Araújo termine 5ème de la course en ligne. Chez les espoirs, Mário de Carvalho termine 23ème de la course en ligne. Chez les élites, l'équipe termine 8ème du contre la montre par équipe et Dario António prend la 31ème place de la course en ligne. En 2016, l'Angola reçoit aussi une invitation de l'UCI pour envoyer 2 cyclistes faire un stage de 35 jours au World Cycling Center de l'UCI en Afrique du Sud, je prends en charge les frais pour envoyer 3 autres coureurs supplémentaires. Ce fut une très bonne expérience qui a abouti à des résultats plutôt satisfaisant pour l'évolution du sport en Angola. En octobre 2016, l'équipe Benfica De Luanda disparaît, ce qui donne lieu à l'apparition de 2 bonnes équipes dans la province de Benguela et tous les coureurs restent sous mon soutien financier jusqu'en mai 2017. Je me mets alors à chercher des contacts pour créer une nouvelle équipe avec de nouveaux sponsors et des objectifs plus grand que l'équipe précédente. Fin mai 2017, un contrat extensible jusqu'à fin 2021 est signé avec Banco Bai, Sicasal et le club Atlético Petroleos De Luanda avec pour objectif de mettre en place une structure pour passer en 2019 au niveau d'équipe UCI Continental. En septembre 2017, l'équipe Bai Sicasal Petro De Luanda participe à la 28ème édition du Tour de Côte d'Ivoire, Dario António termine 4ème au classement général et Bruno Araújo 10ème et meilleur jeune. En décembre, l'équipe participe au 14ème Tour de Madagascar et remporte 9 des 11 étapes, Dario António et Bruno Araújo terminent 2ème et 3ème au classement général et Bai Sicasal Petro De Luanda remporte le classement par équipe."

     "En 2018, grâce au développement du cyclisme dans le pays, les acteurs directs et indirects du cyclisme angolais ont commencé à investir pour permettre un plus grand contrôle de la course grâce aux systèmes électroniques comme les puces ou la photo finish. Depuis les années 2000, le calendrier des compétitions en Angola a eu entre 10 et 24 Grands Prix par an, sauf de 2006 à 2010, et depuis 2016 le calendrier est plus régulier avec entre 18 et 24 Grands Prix par an. Toujours en 2018, le cyclisme Angolais a augmenté ses participations internationales avec 4 équipes présentes dans les compétitions en Afrique du Sud. L'équipe Bai Sicasal Petro De Luanda a participé à 4 grandes courses (Tour du Maroc, Tour du Rwanda, Tour de la République Démocratique du Congo et GP Torres Vedras au Portugal) et a obtenu ses meilleurs résultats sur le Tour de la RDC où le junior Hélvio Lemos a pris la 5ème place au général et sur le Tour du Rwanda (course UCI 2.2) où Bruno Araújo a été élu plus combatif de la 5ème étape et a remporté le maillot des sprints intermédiaires. 2018 était l'année du grand lancement à l’international et j'ai tout organisé pour qu'en 2019 l'équipe Bai Sicasal Petro De Luanda soit acceptée comme équipe UCI Continentale à la fois par la Fédération Angolaise de Cyclisme (FACI) et par l'Union Cycliste Internationale (UCI)"...

     Nous tenons à remercier Carlos pour ce témoignage très complet sur l'histoire du cyclisme Angolais.

Bai - Sicasal - Petro de Luanda au niveau Continental

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     L'équipe Bai Sicasal Petro De Luanda dirigée par Carlos Araújo a obtenu le statut d'équipe UCI Continentale en 2019 et a pris part à 2 des 3 plus grandes courses Portugaises : la Volta a Portugal et la Volta ao Alentejo. Carlos Araújo a donc atteint l'objectif fixé quelques années plus tôt : "Cela a toujours été mon objectif et mon rêve d’emmener une équipe angolaise au Tour Portugal et d’essayer de participer aux compétitions les plus importantes. Pour que cet objectif soit une réalité nous devions nous préparer bien avant, et nous l'avons fait, nous avons prouvé à nos sponsors en Angola que notre équipe pourrait se défendre et avoir le même niveau que d'autres équipes professionelles. Fin 2018, nous sommes rentré en contact avec la Fédération dAngolaise de Cyclisme (FACI) et l'UCI pour enregistrer notre équipe comme équipe Continentale et notre dossier a été accepté." L'équipe est principalement financée par la banque Angolaise BAI, par Sicasal qui est le leader de l'industrie de la viande en Angola, ainsi que par Carlos Araújo lui même et sa femme Filomena Correia qui fournissent tout le matériel, les vélos et les véhicules à l'équipe. "Il n'a pas été facile de convaincre nos sponsors car ils ne savaient pas ce qu'est une équipe de ce niveau."

     En 2019, l'équipe Bai Sicasal Petro De Luanda a obtenu des tops 10 d'étapes sur le Tour du Rwanda et la Volta a Portugal (2 courses UCI 2.1), et en fin d'année Dário António et Bruno Araújo réalisent le doublé au classement général du Tour du Faso (UCI 2.2) après que l'équipe ait remporté le contre la montre par équipe le premier jour. "Je suis très heureux, nous dit Carlos, car c'est la première fois que remportions une course par étape UCI." L'Angola participe aussi aux Jeux Africains organisés au Maroc : Dário António termine 6ème du contre la mondre et Bruno Araújo 11ème de la course en ligne.

     "La visibilité qu'a eu l'équipe sur le circuit mondial en 2019 lui a permis de continuer l'année suivante" nous explique Carlos Araújo. Cependant, il n'a pas été possible de conserver les 3 coureurs Portugais qui avaient été recrutés pour apporter leur expérience à l'équipe en 2019, car le budget de l'équipe a nettement baissé en raison de la forte dévaluation de la monnaie Angolaise. A la place, le Chilien Carlos Iván Oyarzún (ancien coureur notamment de l'équipe Movistar mais qui avait été suspendu 4 ans suite à un contrôle positif en 2015) et le français Stevan Kervadec ont rejoint l'équipe pour courir quelques courses, mais sans être payés : "ils font partie de l'équipe à un coût nul, nous n'avons aucun engagement et aucune responsabilité avec ces coureurs." Stevan Kervadec n'a pas eu l'occasion de courir avec Bai Sicasal Petro De Luanda avant l'interruption de la saison mais il nous a expliqué pourquoi il aurait dû rejoindre l'équipe Angolaise : "J'ai beaucoup de contacts avec des équipes africaines car j'ai déjà couru là-bas et je me suis toujours intéressé au cyclisme là-bas. Je trouve qu'ils se débrouillent plutôt bien avec leurs moyens et que leurs courses sont complètement différentes des nôtres. Je me suis tourné vers eux pour aller faire des courses 'exotiques' car je n'ai pas la prétention ni le niveau d'être un coureur pro. J'aurais dû faire des courses au Portugal ainsi que certaines courses africaines UCI et nationales avec eux entre mars et septembre." "En début de saison, continu Carlos Araújo, l'équipe était invitée sur la Tropicale Amissa Bongo au Gabon et Carlos Oyarzún a obtenu une excellente 6ème au classement général. Nous avons aussi fait partie des équipes les plus combatives avec 2 prix de la combativité pour Dario António et Carlos Oyarzún lors des 6ème et 7ème étapes. En février, Bai Sicasal Petro De Luanda était à nouveau au départ du Tour du Rwanda et s'en est bien sorti sur cette course très montagneuse avec une équipe sans vrai grimpeur."

     La crise actuelle ne facilite pas les choses dans un pays déjà très fragile économiquement. "Pour notre budget 2020, la dévaluation de notre monnaie, le Kwanza, nous a fait perdre environ 47% de notre valeur, estime Carlos Araújo, en ajoutant à cela la pandémie nous risquons de perdre beaucoup plus, et nos objectifs pour 2020 risquent de ne pas être atteints." Mais malgré le flou, Carlos reste optimiste pour la suite : "De bons vents viendront pour le cyclisme Angolais, mais il est très difficile de convaincre nos sponsors qui ont du mal à voir le retour sur investissement que leur apporte le sponsoring. Le grand objectif de l'Angola est d'avoir une équipe Continentale Pro en 2023 pour être présent sur les plus grandes courses du monde." Aujourd'hui, le cyclisme Angolais compte 21 équipes et 450 coureurs de différents niveaux et catégories, ainsi que des coureurs VTT. La famille Araújo fait don de matériel et d'équipement à toutes les provinces de l'Angola qui pratiquent le cyclisme ce qui a permis ce développement depuis l'indépendance de l'Angola jusqu'à aujourd'hui.  Stevan Kervadec a été impressionné par le professionnalisme : "L'équipe se débrouille vraiment bien dans un pays en crise …. Ils ont réussi à se structurer rapidement et de manière efficace avec des infrastructures et du matériel (vélos de contrat, bus, voitures, etc.…) dignes de bonnes équipes amateurs européennes." Bruno Araújo résumé la situation : "Le cyclisme Angolais commence à atteindre un bon niveau, mais comme nous traversons une crise financière dans notre pays nous devons souvent nous limiter dans beaucoup de choses. Cependant, les choses ont beaucoup évolué, nous avons une entreprise qui organise tous les événements qui est ORPED Angola, nous avons la première marque de vélos Angolaise enregistré à l'UCI qui est Tchaco, c'est une super évolution."

Merci beaucoup à Bruno et Carlos Araujo pour leurs réponses très détaillées et très intéressantes ainsi qu'à Stevan Kervadec.

On espère que Bruno, Stevan et leurs équipiers pourront bientôt se retrouver sur les routes et que le cyclisme Angolais parviendra à  bien passer la crise actuelle pour poursuivre son évolution.

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